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Travailler et avoir faim : la nouvelle précarité invisible

Alors que l’emploi a longtemps été perçu comme un rempart contre la pauvreté, le premier Baromètre national des travailleurs pauvres dévoilé par Andès, en partenariat avec Ipsos, bouscule cette certitude. Travailler n’est plus synonyme d’une vie décente : près de 10 % des actifs français souffrent de privations alimentaires. Un phénomène alarmant et encore largement sous-estimé.

Pourquoi avoir lancé cette étude ?

Andès, l’Association Nationale des Épiceries Solidaires, a constaté sur le terrain une hausse préoccupante du nombre de travailleurs pauvres fréquentant ses structures. Forte de ce constat, elle a décidé de lancer une enquête de fond pour :

  • Rendre visible cette nouvelle pauvreté masquée.

  • Alerter les pouvoirs publics et les acteurs économiques.

  • Promouvoir l’épicerie solidaire comme solution adaptée.

Le but est clair : sortir les travailleurs pauvres de l’invisibilité sociale dans laquelle ils sont enfermés.

Un échantillon inédit pour une réalité ignorée

Pour ce baromètre, Ipsos a interrogé 1 000 actifs en situation de précarité (contrats instables, indépendants précaires, salariés sous le seuil de pauvreté fixé par l’Insee). Une photographie rare et précieuse d’une frange de la population dont les difficultés restent souvent ignorées.

Travailler, mais souffrir de la faim : un paradoxe moderne

Les résultats sont édifiants :

  • 53 % des travailleurs pauvres déclarent ne pas manger à leur faim.

  • 40 % sautent régulièrement des repas.

  • 77 % redoutent une aggravation de leur situation.

Le lien traditionnel entre emploi et sécurité alimentaire vole en éclats. Les travailleurs pauvres sont frappés de plein fouet par l’inflation, les contrats précaires, et l’érosion de leur pouvoir d’achat.

L’instabilité professionnelle : facteur aggravant

Les parcours des travailleurs pauvres sont marqués par l’instabilité :

  • 21 % ont connu le chômage récemment.

  • 20 % ont vu leur situation familiale affecter leur emploi.

  • 14 % ont dû s’arrêter pour aider un proche.

Près de 60 % d’entre eux acceptent des temps partiels subis ou des horaires décalés pour survivre, et 36 % cumulent plusieurs emplois. Cette instabilité a des conséquences directes sur la santé mentale et physique : anxiété, nervosité, détérioration de l’état de santé.

L’alimentation : variable d’ajustement dans la précarité

La contrainte budgétaire se traduit par des sacrifices alimentaires massifs :

  • 83 % des répondants ont réduit leurs dépenses alimentaires.

  • 74 % mangent principalement des féculents par obligation.

  • 69 % jugent une alimentation saine hors de portée.

La variété et la qualité nutritionnelle disparaissent des assiettes, transformant l’alimentation en source de stress quotidien.

Les enfants, premières victimes silencieuses

La précarité alimentaire impacte également les enfants :

  • 61 % des parents ne peuvent offrir d’aliments plaisirs.

  • 34 % limitent les portions.

  • 27 % avouent ne pas pouvoir nourrir leurs enfants à leur faim.

Certains recommandent même à leurs enfants de “manger plus à la cantine” pour compenser les manques domestiques. Une stratégie de survie qui souligne l’ampleur du drame social.

Cuisiner : un luxe ou un obstacle

La cuisine maison, souvent associée à l’économie, devient un défi :

  • 45 % manquent de temps,

  • 37 % souffrent de solitude,

  • 25 % n’ont pas l’équipement nécessaire.

Résultat : près d’un quart des travailleurs pauvres ont recours aux plats préparés ou à la restauration rapide, aggravant encore leur fragilité nutritionnelle.

Le recours encore limité aux aides alimentaires

Malgré leur situation critique, seuls 36 % des travailleurs pauvres sollicitent les aides alimentaires. Ce faible recours est dû à :

  • La méconnaissance des dispositifs (64 %),

  • La gêne ou la honte (32 %),

  • Le sentiment d’inéligibilité (56 %).

Cependant, ceux qui franchissent le pas et fréquentent les épiceries solidaires en retirent des bénéfices tangibles : meilleure gestion du budget, accès à des produits frais, regain de confiance.

Andès : une réponse innovante à la précarité alimentaire

Depuis 2000, Andès œuvre pour offrir une alternative respectueuse à l’aide alimentaire traditionnelle. Son modèle d’épiceries solidaires repose sur trois principes :

  • Liberté de choix,

  • Prix réduit (20 % du prix du marché),

  • Accès à une alimentation saine et variée.

Fédération de plus de 630 structures, Andès prône une approche inclusive, en phase avec la réalité actuelle : celle d’une précarité qui touche désormais aussi les travailleurs.

Le premier Baromètre national des travailleurs pauvres dévoile une urgence sociale majeure : l’érosion du lien entre travail et accès aux besoins fondamentaux. Travailler ne suffit plus à manger à sa faim. Face à cette nouvelle précarité, il est impératif de repenser les politiques sociales et de soutenir des dispositifs innovants comme les épiceries solidaires d’Andès, afin que chacun puisse accéder à une alimentation digne, quel que soit son emploi.

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