Les Français(es) sont-elles/ils propres ?
En 1951, le magazine Elle publiait une enquête qui fit scandale en mettant en évidence les conditions déplorables d’hygiène corporelle des Françaises qui souffraient encore, en cette période de reconstruction, d’un manque criant d’accès au confort sanitaire de base (ex : eau chaude, salle de bain ou douche). Soixante dix ans après cette enquête, l’Ifop réalise une enquête permettant de faire le point sur la propreté corporelle et domestique des Français à une période de l’année où le respect des règles d’hygiène est un enjeu de santé publique. Réalisée pour le compte de Diogène France, société de nettoyage insalubre spécialisée dans les logements de victimes du syndrome de Diogène, cette enquête montre que, si globalement l’hygiène des Français a radicalement changé depuis les années 1950, certains pans de la population restent encore éloignés des standards de propreté, en particulier parmi les personnes les plus âgées et les plus isolées du reste de la société.
L’enquête a été menée par l’Ifop auprès d’un échantillon de 2 005 personnes, représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus, par questionnaire auto-administré en ligne du 31 Janvier au 03 Février 2020.
Une toilette complète loin d’être quotidienne
- Seuls 3 Français sur 4 (76%) procèdent à une toilette complète tous les jours.
- Les femmes sont plus portées sur leur hygiène que les hommes, puisque 81% d’entre elles procèdent à une toilette complète « au moins une fois par jour » contre 71% des hommes (alors qu’elles n’étaient que 52% en 1951).
- Les autres catégories de la population où la pratique est faible sont généralement des personnes isolées géographiquement (59% des ruraux), professionnellement (60% des chômeurs) ou socialement (60% des femmes ne recevant jamais personne à leur domicile).
Plutôt douche ou bain ?
- En 1954, seulement 10% des Français possédaient une douche/bain, aujourd’hui 88% possèdent une douche et 61% une baignoire.
- 63% déclarent prendre une douche tous les jours, contrairement au bain, puisque seulement 6% en prenne un quotidiennement.
- On dénombre là encore moins d’adeptes chez les hommes et en particulier chez ceux âgés de 65 ans et plus qui ne sont que 36% à prendre une douche quotidiennement (contre 46% des femmes du même âge).
Une fréquence de lavage des cheveux encore très genrée…
- Seules 8% des femmes se les lavent tous les jours. La norme étant plutôt un rythme d’un shampoing tous les deux jours ou 2 fois par semaine (62%, contre 51% chez les hommes).
- Concernant les hommes, ils sont 3 sur 10 à le faire tous les jours ! Une obsession du shampoing légèrement plus accentuée chez les jeunes de moins de 25 ans (35%).
- L’hygiène capillaire des Françaises a ainsi beaucoup évolué depuis le début des années 50, puisqu’en 1951, les 3/4 d’entres elles se lavaient les cheveux moins d’une fois par semaine (77%) contre 8% en 1986 et 4% en 2020.
Le respect des règles sanitaires au quotidien : les femmes plus attentives !
- À peine 2 hommes sur 3 (68%) se lavent les mains systématiquement après être allés aux toilettes (contre 75% des femmes).
- Et moins d’1/3 d’entre eux le font après avoir pris les transports en commun (31%, contre 42% des femmes).
- Plus étonnants encore, seuls 25% des Français se lavent les mains après s’être mouché, un chiffre démontrant clairement l’ignorance des règles sanitaires de base en dépit des messages de santé publique martelés et du contexte virale qui règne actuellement…
Un caleçon par jour ?
- Si la quasi-totalité des femmes (94%) changent de culotte tous les jours, à peine 3 hommes sur 4 (73%) changent de slip/caleçon tous les jours.
- Une tendance accentuée chez les personnes âgées, puisque seuls 50% des hommes de plus de 65 ans changent de slip/caleçon tous les jours !
- Une faible cadence que l’on retrouve également chez les femmes et leurs soutiens-gorge : seules 28% d’entres elles le changent tous les jours.
- Une hygiène vestimentaire féminine qui a tout de même radicalement changé ces dernières années : en 1951, 17% des Françaises changeaient de culottes tous les jours, contre 82% en 1986 et 94% en 2020.
Le syndrome de Diogène
- 62% des Français n’ont jamais entendu parler du syndrome de Diogène.
- Ainsi, si la majorité des Français ignorent ce syndrome, l’hygiène reste tout de même un facteur important dans leur choix de fréquentation. En effet, 39% des Français ont déjà cessé de fréquenter quelqu’un qui négligeait son hygiène corporelle.
- De même, 31% ont déjà mit fin à une relation avec quelqu’un qui négligeait l’entretien de son intérieur ou la propreté de son foyer, 29% concernant quelqu’un qui négligeait la manière de s’habiller, ou la propreté de ses vêtements.
François Kraus, Directeur du pôle Genre, Sexualité et Santé Sexuelle à l’Ifop L’intérêt de cette enquête était de montrer si les préjugés concernant le manque d’hygiène corporelle des Français, était un mythe ou une réalité. Les résultats montrent que si, globalement, les choses ont énormément progressé en matière d’hygiène chez les Français depuis la seconde guerre mondiale, il reste tout de même encore quelques “poches de saleté” chez une proportion non négligeable de la population, notamment chez les hommes et les personnes âgées.
Ce manque d’hygiène chez les seniors et notamment chez les hommes est lié principalement à des variables souvent moins économiques, que sociales. En effet, le manque de sociabilité joue fortement, puisque les mauvais comportements sont globalement plus répandus en milieu rural, chez les personnes au chômage ou chez les personnes recevant rarement des proches ou des amis chez eux. Le critère en la matière réside ainsi plus dans la perception du regard des autres que sur le niveau de vie des personnes.
Il est également intéressant de noter que si les seniors, notamment les plus de 65 ans, sont moins rigoureux quant à la fréquence de changement de sous-vêtements, cela est lié à une fracture générationnelle en la matière. Cette catégorie de personne a longtemps été éduquée selon un rythme de changement vestimentaire, de douche ou de toilette moins soutenu qu’aujourd’hui. Ainsi, malgré des progrès considérables en matière sanitaire, une partie non négligeable des seniors continue à avoir des pratiques hygiéniques proches de celles qu’ils ont connues dans leur enfance.
On constate ainsi, que l’hygiène corporelle est très étroitement liée à l’isolement social, qui apparaît comme la variable déterminante à un manque d’hygiène global. Le regard des autres pèse et incite donc les Français, y compris les seniors à faire plus attention à leur hygiène.