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Cancers d’origine inconnue : la coordination nationale de l’Institut Curie change le pronostic des patients

Une étude parue dans The Lancet Regional Health Europe confirme l’efficacité clinique d’une prise en charge pluridisciplinaire nationale dédiée aux cancers de primitif inconnu (CUP), sous la direction du Dr Sarah Watson à l’Institut Curie. Grâce à cette approche concertée, la survie des patients progresse sensiblement, ouvrant la voie à une nouvelle ère de médecine personnalisée en oncologie.

Un défi médical majeur : soigner sans connaître l’origine du cancer

Les cancers de primitif inconnu (CUP) constituent l’un des mystères les plus redoutables de l’oncologie moderne. Ils se manifestent par des métastases alors que la tumeur d’origine demeure introuvable, même après des examens approfondis. En France, près de 7 000 nouveaux cas sont recensés chaque année, selon les données épidémiologiques.
Ces cancers sont souvent diagnostiqués à un stade avancé, et les traitements reposent encore fréquemment sur des chimiothérapies empiriques à large spectre, peu efficaces. La survie médiane dépasse rarement douze mois, rendant le pronostic particulièrement sombre.

Une avancée portée par la science et la concertation

Face à ce constat, l’Institut Curie a lancé en 2020 une réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP) nationale dédiée aux CUP. Ce dispositif réunit chaque semaine des oncologues, anatomopathologistes et biologistes moléculairesissus de plusieurs centres hospitaliers universitaires et centres de lutte contre le cancer.
Leur mission : analyser conjointement les dossiers des patients, coordonner les examens nécessaires — cliniques, histologiques et moléculaires — et orienter vers des traitements adaptés.
Sous la direction du Dr Sarah Watson, oncologue médicale et chercheuse à l’Institut Curie, cette coordination a permis de franchir un cap dans la compréhension et la prise en charge de ces cancers atypiques.

« En identifiant l’origine probable de la maladie ou une anomalie moléculaire spécifique, on peut sortir de l’impasse thérapeutique et proposer un traitement personnalisé », explique le Dr Watson.

Des résultats inédits publiés dans The Lancet Regional Health Europe

Entre 2020 et 2023, 246 patients ont bénéficié de cette expertise nationale. Les résultats, publiés le 7 novembre 2025, sont prometteurs :

  • 76 % des patients ont pu bénéficier d’analyses anatomopathologiques et moléculaires complètes ;

  • Dans 70 % des cas, l’origine probable du cancer a pu être identifiée (souvent digestive ou pulmonaire) ;

  • Et surtout, la survie globale médiane atteint 18,6 mois, contre moins d’un an avec les chimiothérapies empiriques classiques.

Ces chiffres traduisent une réduction de près de 40 % du risque de décès pour les patients ayant bénéficié de la prise en charge personnalisée recommandée par la RCP.

Pour Sarah Watson, ces données valident une intuition : la synergie entre expertise clinique et biologie moléculairetransforme radicalement la trajectoire thérapeutique. L’étude, menée dans des conditions réelles sans sélection préalable des malades, démontre la faisabilité à grande échelle d’une telle coordination et son impact direct sur la survie.

De la recherche à la pratique clinique

Cette réussite s’inscrit dans la continuité du plan France Médecine Génomique 2025, qui vise à démocratiser l’accès au séquençage moléculaire pour les maladies rares et les cancers métastatiques.
Dans le cadre de la RCP-CUP, un processus en deux temps a été mis en place :

  • RCP1 : présentation du dossier, vérification du caractère inconnu du cancer, recommandations et prescriptions d’examens complémentaires (anatomopathologiques et moléculaires) ;

  • RCP2 : discussion des résultats pour identifier la tumeur d’origine et proposer un traitement ciblé si possible.

Ce dispositif favorise une approche intégrée, rigoureuse et réactive, dans laquelle chaque patient bénéficie d’un parcours personnalisé, coordonné à l’échelle nationale.

Une ambition : rapprocher l’expertise des territoires

L’enjeu désormais est de décliner cette coordination à l’échelle régionale.
L’objectif de l’Institut Curie est clair : permettre à chaque patient, quel que soit son lieu de résidence, de bénéficier de cette approche pluridisciplinaire. Cela suppose la mise en place d’un réseau de centres experts régionaux, capables de collaborer étroitement avec la structure nationale.

« Nous voulons rapprocher les patients de l’expertise, faciliter l’accès aux examens et garantir une équité territoriale dans la prise en charge », souligne le Dr Watson.

Une telle organisation s’inscrit pleinement dans la logique de médecine personnalisée et dans la lutte contre les inégalités de santé. En effet, jusqu’à présent, l’accès aux technologies de biologie moléculaire restait inégal selon les régions, limitant les chances de diagnostic précis et de traitement sur mesure.

Un modèle pour l’avenir de l’oncologie

Au-delà du cas particulier des CUP, cette étude illustre les bénéfices d’une concertation multidisciplinaire centraliséedans le traitement des cancers complexes.
En combinant l’analyse clinique, pathologique et génomique, la médecine devient plus prédictive et plus adaptée aux singularités biologiques de chaque patient.
Cette démarche s’inscrit dans une tendance mondiale où la médecine de précision redéfinit les standards du soin en cancérologie.

L’Institut Curie, fidèle à l’esprit pionnier de Marie Curie, continue d’être un moteur d’innovation médicale et scientifique. Ses 4 000 chercheurs, médecins et soignants unissent leurs compétences pour transformer la recherche en solutions concrètes pour les patients.

L’expérience menée par le Dr Sarah Watson et son équipe pourrait bien marquer un tournant dans la lutte contre les cancers d’origine inconnue. En prouvant que la collaboration pluridisciplinaire améliore la survie, elle ouvre la voie à une réorganisation nationale de la cancérologie, fondée sur la coopération, la science et la proximité.
Demain, grâce à ces réseaux d’expertise intégrés, chaque patient atteint d’un cancer rare ou mal caractérisé pourrait bénéficier d’une stratégie thérapeutique sur mesure, partout en France.
Une démonstration que la médecine de précision n’est pas seulement une promesse technologique, mais une réalité humaine en marche — au service de la vie.

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