Un marché sous pression, partagé entre déconsommation et besoin de se faire plaisir
Comme le prouve l’étude BravoPromo, en 2023, le marché français de l’habillement a connu un recul de 3,5 % par rapport à 2022. Les ventes en magasin ont diminué de 0,6 % à périmètre constant. Malgré un premier semestre dynamique porté par les soldes, la consommation a chuté à partir d’août. La hausse de 2 % des ventes en ligne n’a pas suffi à compenser cette baisse. De plus, les défaillances d’enseignes et les fermetures de points de vente ont conduit à la suppression d’au moins 4 000 emplois.
Ce recul confirme la modification des comportements d’achat des Français, sous l’effet de la crise sanitaire et de l’inflation. Depuis 2019, les magasins ont perdu près de 19 % de leur fréquentation, soit un client sur cinq.
Cependant, la mode demeure un secteur important, avec 220 000 salariés. Elle est la première employeuse du commerce de détail spécialisé. Les consommateurs aspirent toujours à se faire plaisir avec de nouveaux vêtements, mais de manière plus raisonnée et en chassant les bonnes affaires. Selon Yohann Petiot, directeur général de l’Alliance du Commerce, « il existe une notion de plaisir qui s’est émoussée dans le secteur de l’habillement. L’enjeu est donc de redonner du plaisir et de la désirabilité à s’habiller aux clients ».
Les enseignes doivent réenchanter l’expérience d’achat, en magasin comme en ligne, malgré un contexte de déconsommation qui semble durable. Un défi de taille qui nécessite de repenser les collections, les prix, les promotions et les services pour s’adapter aux nouvelles attentes.
L’essor de la seconde main et du reconditionnement
La seconde main connaît un engouement grandissant. Entre 2013 et 2024, la proportion de Français achetant des produits d’occasion au moins une fois par an est passée de 35 % à 49 %, soit une augmentation de 40 %.
Les ventes ont progressé de manière encore plus spectaculaire avec une hausse de 73 % sur la période. Cet engouement s’explique par des raisons économiques et environnementales. D’une part, l’achat-vente d’articles de mode de seconde main permet de réaliser des économies substantielles et de dénicher des pièces à petits prix. D’autre part, cette pratique s’inscrit dans une démarche de consommation plus durable et responsable.
Le reconditionnement séduit également. En seulement trois ans, de 2021 à 2024, la part des Français achetant des produits reconditionnés au moins une fois par an a bondi de 50 %, passant de 26 % à 39 %.
Le marché de la seconde main, dynamisé par des plateformes comme Vinted, représente désormais un relais de croissance significatif. Son potentiel demeure très important, car plus d’un vêtement sur deux dormirait dans les placards des Français. Et cette démocratisation de l’occasion rebat les cartes. Les enseignes traditionnelles n’ont d’autre choix que de s’engouffrer dans cette brèche, à l’image de Camaïeu qui a lancé son site dédié Camaïeu Vintage ou des Galeries Lafayette avec Rewear. Leurs enjeux sont de capter une part de ce marché en plein essor, de rajeunir leur image, de fidéliser leur clientèle et de promouvoir une mode plus circulaire. L’occasion est aussi une opportunité de redonner une seconde vie à leurs invendus. Il reste néanmoins à massifier la collecte des pièces de seconde main et à structurer toute une filière.
Les marketplaces et les réseaux sociaux, nouveaux terrains de jeu de la mode en ligne
Les ventes de mode en ligne se stabilisent à un niveau supérieur de 80 % à celui de 2019. Pour continuer à capter le potentiel du e-commerce, les enseignes misent sur de nouveaux leviers.
L’un d’eux est le développement des marketplaces. En 2022, plus d’un tiers des e-commerçants y ont vendu leurs produits. Ces plateformes ont enregistré une croissance de leur volume d’affaires de 33 % par rapport à 2019. Elles permettent aux marques de mode de toucher une audience qualifiée et d’augmenter leur visibilité sans avoir à investir dans l’acquisition de trafic.
Les réseaux sociaux sont devenus un autre terrain de jeu incontournable. Facebook, Instagram ou TikTok multiplient les formats publicitaires et les fonctionnalités e-commerce. Les consommateurs peuvent ainsi découvrir des produits de mode de manière inspirante et ludique, puis les acheter sans même quitter leur application préférée. Le social commerce facilite le parcours client en jouant la carte de l’instantanéité et de l’émotion.
Le marketing d’influence joue également un rôle clé. Bien évidemment, seulement 13 % des Français suivent des influenceurs, avec une surreprésentation des moins de 25 ans. Mais 15 % ont déjà acheté un produit mis en avant par une célébrité ou un influenceur. Un taux de conversion intéressant qui aiguise l’appétit des marques de mode. À l’image du chinois Temu, elles sont nombreuses à collaborer avec des armées de micro et nano-influenceurs pour promouvoir leurs produits. Un moyen de cibler de nouvelles audiences et de générer des ventes additionnelles.