Les Britanniques sont favorables à une application de traçage gérée directement par la Santé Publique

Développer une application de traçage numérique respectueuse de la vie privée et pouvant être largement adoptée au Royaume-Uni n’est possible que si elle est gérée par le NHS, plutôt que par le gouvernement, selon les chercheurs de la Cass Business School (City University of London).

Les chercheurs ont constaté que les taux d’adoption de l’application augmentent encore si elle est liée à un test prioritaire de dépistage du Covid-19 chez les personnes recevant les alertes d’infection. Ils ont également noté que les utilisateurs veulent une « date limite » pour la suppression des données collectées via l’application.

Cette étude intervient alors que le gouvernement, les autorités locales et les services de santé publique se concentrent sur la meilleure façon d’inciter le grand public à adopter une application de traçage numérique. Le professeur Caroline Wiertz de la Cass Business School, co-auteur de l’étude, estime que la question centrale est de déterminer quelles configurations encouragent les gens à utiliser une application.

« C’est un point crucial, déclare-t-elle, car une application de traçage numérique ne sera pas efficace si elle n’est pas largement adoptée par le public, aussi sophistiquée ou performante soit-elle. »  « L’enjeu le plus sensible pour la mise en œuvre réussie d’une application de traçage numérique est la gestion des problèmes relatifs à la vie privée et aux libertés individuelles inhérents à ces applications. »

Les chercheurs ont demandé à un échantillon représentatif de 2061 adultes britanniques de choisir entre différentes configurations d’applications de traçage numérique afin d’évaluer leurs préférences pour diverses fonctionnalités. Ces données ont permis de simuler les taux d’adoption des différentes applications potentielles de traçage numérique.

Les chercheurs précisent que ces taux d’adoption résultent de conditions idéales où tout le monde est informé sur l’application, et que les taux d’adoption réels seront plus bas.

Les principales conclusions sont les suivantes :

L’application « Expected NHSX » annoncée par le gouvernement britannique (sur la base d’une analyse de la couverture médiatique et des blogs NHSX) a le taux d’adoption le plus bas, avec 51,1 %.

La raison principale pour laquelle l’application « Expected NHSX » obtient un taux d’adoption plus bas est que, dans ce scénario, le gouvernement est perçu comme celui qui contrôle l’application et ses données, et qu’aucun plan n’a été annoncé pour lier l’application à des tests prioritaires.

Les chercheurs ont également découvert des différences intéressantes concernant la probabilité d’adoption de l’application. La préférence pour une application de traçage numérique diminue avec l’âge et augmente avec le revenu du ménage. Les chercheurs ont noté que les personnes à faibles revenus et les personnes âgées sont moins susceptibles de posséder un smartphone, et que les personnes âgées peuvent se sentir handicapées sur le plan technologique par l’utilisation des applications. Les Londoniens interrogés ont une préférence plus marquée pour l’application, ce qui peut indiquer que celle-ci séduit davantage les résidents des zones densément peuplées.

Enfin, les chercheurs ont également constaté que les gens sont plus susceptibles d’adopter une application s’ils ont peur du Covid-19, si eux-mêmes ou leur famille ont été malades ou ont ressenti des symptômes, et/ou s’ils ont été impactés financièrement ou psychologiquement par le confinement.

Sur la base de leurs simulations, les chercheurs recommandent une application de traçage numérique assurant l’équilibre entre adoption maximale et protection de la vie privée et des libertés individuelles.  L’application présenterait les caractéristiques suivantes :

  1. supervision de l’application par le NHS ;
  2. accès prioritaire aux tests pour les personnes en isolement utilisant l’application ;
  3. pas d’usage pour la surveillance ou le renforcement de l’isolement ;
  4. utilisation de l’application basée sur le volontariat ;
  5. stockage des données limité à 14 jours ;
  6. déclaration facultative des résultats au test ;
  7. traçage numérique anonyme ;
  8. pas de téléchargement des données de localisation ;
  9. alertes pour les infections confirmées et suspectées ;
  10. disponibilité à l’international.

Il est surprenant et troublant de constater que les personnes interrogées étaient disposées à partager plus de données et à accepter des mesures plus invasives que celles imaginables en temps « normal ».

Le professeur Wiertz explique qu’en période de crise, nous sommes souvent prêts à faire des compromis sur certains aspects de la vie privée et des libertés individuelles pour le bien de tous.

« Les décideurs impliqués dans la conception et le lancement de cette application de traçage numérique ont une énorme responsabilité dans sa mise au point », déclare-t-elle.

« Ils doivent trouver le juste équilibre afin de concevoir et mettre en œuvre une application qui, d’une part, repose sur notre coopération et nos données personnelles pour être efficace, mais qui, d’autre part, n’outrepasse pas notre propension à faire des sacrifices et à partager ces données pour lutter contre la pandémie. »

Les chercheurs ont demandé à 2061 adultes leurs préférences lors des simulations de quatre applications potentielles de traçage numérique.  Les participants étaient représentatifs de la population britannique en termes de sexe, d’âge et d’ethnie.

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