« Via nos lignes d’écoute psychologique et webinaires, nos équipes ont constaté une augmentation de la détresse psychologique que nous avons voulu évaluer avec cette étude. Ces résultats sont très préoccupants et montrent l’urgence d’agir. Nous en appelons à une véritable prise de conscience des pouvoirs publics et des entreprises. La crise sanitaire a pris de court toute la société, les entreprises y compris. Mais elle n’exonère pas de notre responsabilité en tant qu’employeur en matière de protection de la santé de leurs salariés. Après les gestes barrières, il convient de mettre en place des actions pour la sécurité psychologique » déclarent Christophe NGUYEN, psychologue du travail et président d’Empreinte Humaine, et Jean-Pierre BRUN, co-fondateur d’Empreinte Humaine et expert conseil.
Les salariés français très atteints par le confinement
44% des salariés présentent de la détresse psychologique (27% modérée et 18% élevée) et ¼ des salariés est en risque de dépression nécessitant un accompagnement. « La détresse psychologique modérée est l’antichambre de la détresse élevée. Il faut absolument surveiller l’évolution de ces taux » commente Jean- Pierre BRUN.
Charge mentale alourdie et cumul des rôles obligent, les femmes sont plus impactées par le confinement puisqu’elles sont 22% à être en détresse élevée contre 14% pour les hommes.
Enfin les managers sont particulièrement exposés, puisque 20% d’entre eux vivent une détresse psychologique élevée. « Les managers sont un pivot central dans l’entreprise. Il faut prendre soin d’eux mais surtout leur donner les outils pour prendre soin de leurs collaborateurs » poursuit Christophe NGUYEN.
Les conditions de travail ont un impact majeur sur la santé psychologique des salariés
Seulement 45% d’entre eux peuvent s’isoler toute la journée pour travailler. 60% travaillent dans leur salon, 1/4 des salariés évoquent travailler plutôt dans une pièce fermée mais initialement n’étant pas dédiée à y travailler (chambre, salle de jeux, etc.). Etre confiné dans un logement de moins de 40 m2 est un facteur de risque important puisque 24,6% de ces personnes sont dans une détresse psychologique élevée. « Le télétravail n’est pas en soi un facteur de risque, ce sont les conditions dans lesquelles il s’effectue qui présentent des facteurs aggravants pour les salariés » précise Jean-Pierre BRUN.
Enfin, contrairement à une idée reçue, les personnes confinées en couple (20%) ou avec un enfant (22%) vivent une détresse élevée plus importante que les autres (rappel : 18%). La question de l’équilibre des vies en situation de confinement est devenu un facteur de risque.
Le chômage partiel ou total des actifs : un facteur anxiogène
Le chômage apparait bien entendu comme un facteur de risque puisque 1/5 des répondants au chômage technique partiel présentent une détresse psychologique élevée. Cette proportion monte à ¼ pour les salariés au chômage technique total.
La performance ressentie et la motivation des salariés régressent
Une vigilance s’impose sur le suivi de la motivation professionnelle qui s’est détériorée pour 1/4 des salariés (26%) depuis le début du confinement. Cette détérioration est de plus grande ampleur chez les femmes (30%), les salariés d’IDF (31%), et pour les salariés confinés avec un ou plusieurs autres proches (32%). Enfin, les personnes présentant une détresse élevée considèrent que leur performance s’est dégradée de 50%. « La santé psychologique, mais aussi la performance déclarée et la motivation se dégradent avec la durée du confinement. La question de du lien entre performance et bien-être est encore plus d’actualité dans ce contexte. Nous allons réaliser d’autres sondages dans les prochaines semaines pour suivre les évolutions » commente Christophe NGUYEN.
Les efforts des entreprises salués par les salariés…
7 salariés sur 10 considèrent que l’entreprise fait son maximum pour aider les salariés et 8/10 ont confiance envers leurs collègues pour les accompagner. Lorsqu’on les interroge dans le détail, sur le soutien qu’ils estiment recevoir des différents acteurs de l’entreprise, les salariés plébiscitent principalement celui de leurs collègues (79%), puis de leur N+1 (70%). Viennent ensuite la direction de l’entreprise (67%), la DRH (59%). Enfin 22,6% d’entre eux disent que leur entreprise n’a mis aucune mesure en place. Et à peine 15,6% des répondants disent que leur entreprise affiche les mesures sanitaires de base du gouvernement. « Même si le COVID19 est exogène, l’entreprise a des moyens de protection psychologique. La durée du confinement est en lui-même un facteur de stress, il reste un mois au moins, les actions doivent se mettre en œuvre dès maintenant » souligne Jean-Pierre BRUN.
…Mais elles n’en font pas assez en matière de sécurité psychologique
Les salariés sont aujourd’hui partagés quant à l’investissement de leur entreprise dans la santé psychologique et la prévention des risques psycho-sociaux de ses employés. Ainsi, seulement 1/3 d’entre eux sont d’accord pour dire qu’ils sont bien informés sur ces risques, que leur direction montre son engagement dans ce domaine et le considère aussi important que la productivité, ou encore que la prévention du stress implique tous les niveaux hiérarchiques de leur organisation.
Les personnes vivent moins de détresse psychologique élevée si elles se sentent soutenues par leur direction (16% vs 21%), la DRH (16% vs 20%), leurs collègues (16% vs 25%) ou confiance envers leur direction (17 vs 21%) et manager (15,5 vs 25%). Ces marques de soutien sont une puissante protection de la détresse psychologique. Toutefois, elles ne sont pas suffisantes pour réduire totalement la détresse psychologique.
« Il est temps de dépasser les uniques numéros verts sans logique de prévention de fond ou les apéros virtuels qui ne sont pas suffisants au regard des enjeux de santé publique et de mettre en place de vrais programmes de santé psychologique des salariés et des managers impliquant en premier lieu l’engagement des comités de direction. La situation est inédite pour tout le monde, des solutions sont possibles, les principes de précaution doivent s’appliquer. La grande majorité des entreprises font preuve de soutien. Sur le plan des risques psychosociaux, il est urgent de développer une culture de sécurité psychologique. A l’heure où les entreprises se projettent dans le déconfinement, cette étape doit prendre en compte l’état psychologique des personnes pour réussir. » conclut Christophe NGUYEN.
Méthodologie de l’étude :
Le Baromètre « Impact de la crise sanitaire sur la santé psychologique des salariés » Opinion Way pour Empreinte Humaine, a été réalisé en ligne. Les interviews ont été faites du 31 mars au 8 avril 2020 auprès d’un échantillon de 2003 salariés représentatif et constitué selon la méthode des quotas, au regard des critères de sexe, d’âge, de secteurs d’activités, de nature d’employeur et de taille d’entreprises.
La mesure de la détresse psychologique se base sur un indicateur validé scientifiquement traduit en 25 langues dans des centaines de publications scientifiques. Il est un indicateur précoce d’atteinte à la santé mentale qui évalue la dépression et l’anxiété. Il s’agit d’un indicateur qui identifie, dans une population, les personnes qui sont plus à risque d’ être atteintes de troubles mentaux sérieux.
Empreinte Humaine, un cabinet engagé pour la qualité de vie au travail
Créé en septembre 2012, le cabinet Empreinte Humaine est un des leaders de son secteur et rassemble des experts qui œuvrent à améliorer la qualité de vie au travail pour prévenir les risques psychosociaux. Couvrant les trois niveaux de prévention : primaire, secondaire et tertiaire, les interventions du cabinet visent à promouvoir trois domaines d’intervention :
Le premier domaine d’intervention est le bien-être des personnes qui comprend la prévention des risques psychosociaux et du stress au travail, la reconnaissance, la motivation et l’engagement.
Le second domaine se centre sur le bien-vivre des collaborateurs et des managers. Pour cela, les actions d’Empreinte Humaine portent sur le respect au travail, la gestion des conflits, le climat d’équipe et les relations interpersonnelles.
Le troisième domaine s’articule autour du bien-faire qui concentre les actions sur les processus de travail, la charge de travail, la clarté des rôles, la conduite des changements.
Empreinte Humaine dispose de toute l’expertise nécessaire ainsi que d’un réseau de consultants opérationnels sur toute la France et dans plus de 20 pays à travers le monde pour accompagner les entreprises et organismes publics lors de leurs actions en matière de qualité de vie au travail. Parmi ses innovations, EH a développé HuCare© un programme de promotion de la santé individuelle pour ancrer et augmenter une culture de la sécurité psychologique dans les entreprises.
1 Le bien-être psychologique correspond aux dimensions positives de la santé psychologique.
2 La détresse psychologique chevauche à la fois des symptômes de dépression et d’épuisement professionnel. Lorsqu’elle n’est pas traitée elle risque d’entrainer des problèmes de santé plus graves, tels que diverses maladies psychosomatiques, l’hypertension artérielle, différents troubles anxieux, la dépression sévère et des troubles addictifs.