Le zèbre, Zebra en anglais, est un drôle d’animal. Ni roi de la jungle, ni héros des documentaires animaliers, il parcourt, en toute discrétion, de longues distances habillé de noir et de blanc, symbole d’une espèce métissée et menacée.
La musique de Charles Pasi lui ressemble. Elle est à la fois acoustique et électrique, tellurique et dynamique, colorée et sombre. Généreuse et fragile. Elle mêle les sentiments et les grooves. Elle vibre avec une intensité de velours, loin des modes et des obligations. Ce nouvel album de Charles Pasi, toujours chez Blue Note, composé entre Istanbul, Paris, Casablanca, New York et l’île Maurice, avec Cyril Atef à la batterie, Vincent Peirani à l’accordéon et Fred Dupont à l’orgue et aux claviers, est une migration sans frontière et aux rayures mouvantes et libres. C’est un disque qui refuse les chapelles et les raccourcis.
“Je voulais faire un disque “sauvage”, pas de maquettes, pas de répétitions, j’ai appelé des musiciens que j’estime mais que je ne connaissais pas personnellement (pour certains) et qui n’avaient jamais joué ensemble. Juste un rendez-vous en studio et voir ce qu’il se passe, avec les risques et l’excitation que ça implique. À l’ère des producteurs rois, je voulais entendre des musiciens jouer. Prendre à contre-pied une tendance un peu métronomique. Aujourd’hui, tout est très, trop cogité. Comme si l’on n’avait plus le droit à l’erreur. À l’accident. On joue sa vie sur un single. C’est regrettable.”
“Le zèbre, pourquoi fait-il des migrations? Pour se nourrir. Moi aussi, je voyage pour pouvoir bouffer. Et le zèbre ne fait que suivre son instinct en essayant d’éviter les crocodiles…” ajoute Charles, amusé. ZEBRA est encore l’anagramme de BRAZE (soudé dans la langue de John Coltrane). Ou quand plusieurs éléments se fondent pour donner naissance à un disque inclassable.